Humoresques

Les premières femmes cochers

Agnès SANDRAS

AUTOMÉDONE, COCHERETTE OU COCHONNETTE, UN ACCÈS DE FIÈVRE SATIRIQUE ET MACHISTE DEVANT LES PREMIÈRES FEMMES COCHERS ? (PARTIE I)

En 1907, des Parisiennes obtiennent pour la première fois le droit de devenir cochers, si elles satisfont à un examen jusque-là  réservé aux hommes. À la préfecture de police, un jury masculin décerne le diplôme après avoir vérifié que les impétrant(e)s connaissent l’art de soigner les chevaux, les itinéraires pour se rendre d’un lieu à un autre, les différentes manœuvres dont la plus technique est le remisage des voitures.

Cette nouveauté ne manque pas de passionner les badauds et la presse. Au XIXesiècle, on s’est esbaudi devant les bas-bleus, les premières bachelièresavocatesdoctoresseset les premières revendications féministes, on a transformé les révolutionnaires de sexe féminin en Vésuviennes (1848), en mégères pétroleuses (1871). C’est dire si des femmes qui embrassent une profession virile ont alors toutes les chances de subir des moqueries… Virile ? Le fait de conduire semble en effet d’hier à aujourd’hui cristalliser les stéréotypes de la domination masculine supposée sur les femmes1. Embrasser une profession jusqu’alors occupée par des hommes, conduire, véhiculer des gens, dresser des animaux,  paraît alors une transgression aux yeux d’une grande partie de la population. Dans ses différents travaux, Juliette Rennesa montré le caractère exceptionnel de l’épisode : des femmes ont pu forger le projet de devenir cochères « aux portes d’une corporation non-mixte dans laquelle ni les employeurs ni les féministes ne les incitaient à pénétrer », grâce à « la création, en mai 1906, de l’École des cochers et des charretiers, fondée par une petite société de bienfaisance, l’Assistance aux animaux […] branche dissidente de la plus ancienne et visible Société protectrice des animaux2». L’auteure a recensé  pour la seule période allant de novembre 1906 (première annonce de la préparation de l’examen de cocher par des femmes) à avril 1907 (seconde promotion de femmes cochers), plus de 200 articles, tout autant de cartes postales, des films et des objets. Nous nous intéresserons ici à l’accès de fièvre satirique qui a accompagné voire devancé ce barnum médiatique3. Humoristes, dessinateurs, journalistes en quête de bons mots, sont alors en très grande majorité des hommes. S’ils ne sont pas nécessairement phallocrates, ils n’ont pu le plus souvent s’empêcher de contribuer à une fièvre machiste, ou du moins d’en souligner les stéréotypes afin de complaire à un public friand (ou supposé friand ?) de ce type de blagues.

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partie 2 : https://histoirebnf.hypotheses.org/11870

partie 3 : https://histoirebnf.hypotheses.org/11938

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